Le fleuve lent de l’âge en nous trace sa voie.
Je me laisse porter comme par un amant.
Au fil des ans, tu me serres plus tendrement
Entre ces bras dont je connais toutes les soies.
La jeunesse, le feu, les accords qui flamboient
Sont de vieux souvenirs pour nous dorénavant,
Qui échangeons, sereins, un sourire en buvant
Les mêmes vins d’hier avec la même joie.
Nôtre est ce bel automne aux feuilles polychromes
Dansant dans le jardin à l’heure de mourir,
Et aux caves baignées de fraîcheur et d’arômes.
Mais un je ne sais quoi, un trouble, un doux zéphyr,
Nous annonce qu’Avril, roi lascif et sauvage,
Fracassera bientôt ce calme paysage.
Maria Banuș (1914-1999)