Au jour emprisonné du fond de nos pupilles,
L’iris du souvenir s’ouvre encore une fois
Et l’eau retrouve l’eau perdue : on n’aperçoit
Plus qu’un même miroir qui tout à coup scintille.
Pour toujours dos à dos, noués, amis parfois –
Qui suis-je sinon toi ? Ma joue ocre de fille
Sent si bon ! Sans pitié l’amour nous déshabille
Et nous brasse les chairs sans nous laisser le choix.
Qui saura s’approcher davantage ? Une triste
Mais malgré tout allègre et rayonnante voix
Vit maintenant sans vie. Un mouchoir de baptiste.
Et un peu de fumée au flanc de la paroi
L’escaladant pour voir si le soleil existe,
Si c’est toi, si c’est moi, ou bien n’importe quoi.
Ilarie Voronca (1903-1946)