Reste !...
As-tu vu ce flocon ? Premier flocon…
Dis, reste…
Je mourrai de peur si tu t’en vas.
Si plus jamais tu ne me réclames,
Comme un fil sorti du canevas
Je me jette vive dans les flammes.
La fleur en pot, vois-la s’efforçant
Par delà les vitres embuées,
D’apercevoir le soleil absent.
Rallumons le feu éteint. Je sens
La nuit flotter sans bruit, échouée
Dans les encoignures du plafond.
Ecoute… C’est le bruit que fait l’automne, écoute !...
Tout enrobé de boue et couvert de chiffons,
Pleurant à grosses gouttes,
Il roule sans fin par les chemins,
Tambourine aux portes de la main.
Oh ! lui-même a froid et vient guetter
Notre incertain petit bout d’été…
Le miroir a englouti la chambre
Tout entière dans ses eaux de plomb
Reste !...
Il neige enfin et c’est décembre
Qui fait qu’au fond nous nous ressemblons.
Dehors tout devient blanc comme cire,
Et mon visage attend ton sourire
Ou trois ou quatre mots hasardés,
Mais même sans rien dire
On peut s’aimer ainsi, juste à se regarder.
« Interior »
Otilia Cazimir (1894-1967)