Il me revient l’écho d’un jour lointain,– j’étais encor jouvenceau de village ! –Et d’un amour resté sans lendemain,Un bref amour, animal et sauvage,Un amour fol et frais comme un matin. * Un jour, adonc, m’en venant par les champs,Bien innocent, je rêvais...
C’est une prison, c’est l’éther d’un chant ;Quand flâne au soleil la terre superbe,Mon esprit se blesse aux cloisons du verbe,Et bave une écume en se desséchant. Près ou loin – le même monde attachantSes bois couchés de violon en gerbes,Avec, au surplomb...
Ton cul tes seins ta peau ta bouche ! Sol gros de toutes les moissons Terrain de jeux, herbe à frissons Pays des bêtes peu farouches Tes océans de chair : séisme ! Quand je redouble mes assauts Et brûle et lance mes vaisseaux Vers tes détroits, tes caps,...
L’âme de la fleur fut ici naguère, Elle nous répond et nous ment encor ; Sa morte chanson s’agrippe à nos corps, Au fil de laquelle, ivres, ils voguèrent. Berçons le parfum des derniers accords Qu’emporte le soir en fleuves grégaires ; Mais d’or, de soleil,...
Certains soirs aux lueurs des braises rougissantes, Maîtresse imite la levrette de son mieux, Tandis qu’au pied du lit, spectateur amoureux, Moi j’agite ma queue épaisse et frémissante. Maîtresse imite la levrette de son mieux Pour contenter ce Maître...
Des mille peines qui te poignent Fais un ballot, fais un paquet, Et grimpe en haut de la montagne, Les mains pleines de fleurs mystiques ; Sous la lune à l’œil fatigué, Viens-t’en susurrer ta supplique : Seigneur, tout ce que je demande, C’est un peu...
Elle a fini par découvrir le pot-aux-roses Je le cachais évidemment Sous mes roses sous-vêtements Ce truc en moi, cette bizarre et rare chose Elle a dit oh ! c’est féérique, oh ! c’est grandiose Je n’étais pas du tout d’accord Ça fait tache dans le décor...
Je suis un chaos de ténèbres, Un pauvre fou, un triste zèbre ; Chante, que le feu de ta voix Illumine ma nuit funèbre ! Belle, vois ma vie haïssable, Fatras de misère et de pleurs… O, ris, dans mon désert de sable Ton rire fait pousser des fleurs ! Tandis...
Donne-moi non ta bouche à fard Mais tes yeux, sombre labyrinthe Où la luxure laisse voir Des rêves fous et hors d’atteinte. Ces yeux profonds comme océan, Que sur leur chaos je me penche Que je redevienne insouciant, Ma mémoire une page blanche ! Mais...
Le ciel se saupoudre d’argent : un violon vibre sur les vagues, Comme si le vent me chantait une romance tendre et vague, Et, scintillant sur l’horizon, un fol appétit de bonheur Mêlé d’un reste de vin doux vient soudain m’incendier le cœur. Du large...
Regarde-moi ma Cendrillon Regarde-moi ta robe brune Toute d’accrocs et de lacunes Toute de replis vermillon Regarde-moi ma Cendrillon Belle et négligente souillon Quel est ici ce trou qui bée Tel une crevasse sans fond Dans les satins souples qui font...
Je cherche le frais dans ces bois fleuris dont le parfum me saoule, Loin de la ville scélérate et des stridences de la foule. M’enveloppent les mailles d’or d’un filet tout frais sécrété, Soleil aux javelots légers, magique splendeur de l’été. Flamboient...
Ta langue est partout souveraine : Montre-moi un pli de mon corps N’adorant pas que cette chienne Vienne lui flairer les abords ! De pied en cap, d’aisselle en aine, Nulle étendue ou corridor Etroit qui ne lui appartienne. Ta langue entre partout par...
I Au nord cette ample mer, ce ténébreux rebord Où règne, croupissant sous l’âpre paix des morts, Une nuit que jamais un astre ne constelle Et que bat le ressac perpétuellement – Affreux un puits d’abandon plein de mugissements Où se tient à l’affût, crânement,...
I Ta bouche s’en revint humide et rouge et haletante De son sentier femelle à l’âpre goût de liberté Ivre contre ma joue elle osa tout me raconter Et la source de miel et la colline aux pieds de menthe II Glissant la langue à fleur de seins Et plus bas...
Ah ! m’enfuir avec toi quelque part loin d’ici, Peut-être jusqu’au pôle où, sous un ciel d’opale, La glace des massifs se disloque à grands cris En cent mille diamants jonchant l’océan pâle. Au zénith on verra, bruissant de tous ses plis Et déchirant...
Je l’aime infiniment cruelle, inexorable, Et je la rêve ogresse ainsi que dans la fable ; Qu’elle me mette en cage au pain sec et à l’eau, Tâtant mon membre nu à travers les barreaux ; Puis, le jugeant un jour affriolamment gros, Qu’elle se le mitonne...
J’ai mis à se faner, dans la nuit de ce livre Dont je sais sur le bout des doigts le moindre mot, Une main de glaïeuls déjà montés en graines, – Pour que parfois je me souvienne De ceux qui sont partis loin de notre hameau, De ceux qui ont cessé de vivre....
Blanche-Neige ô fruit de l’hiver Je veux que tu m’ensevelisses Sous les arpents blancs comme vair De ta jeune chair sans malice Blanche-Neige ô fleur de miroir Je veux m’élancer sur tes pistes Godiller dans tes cheveux noirs De fausse madone aux yeux...
Reste !... As-tu vu ce flocon ? Premier flocon… Dis, reste… Je mourrai de peur si tu t’en vas. Si plus jamais tu ne me réclames, Comme un fil sorti du canevas Je me jette vive dans les flammes. La fleur en pot, vois-la s’efforçant Par delà les vitres...
La première nuit je t’écouterai Exhaler tes pleurs, tes éclats de rire, Ta voix quand d’amour elle se déchire, L’écho de ton cœur, tes cris apeurés, Je boirai tes sons ainsi qu’un vampire ; La première nuit je t’écouterai Chanter et gémir et expectorer....
Aucun désir, aucun tourment – quelle paix ! et pourtant tu trembles En cette heure grise où ton cœur, ton esprit tout entier te semblent S’enfoncer dans les froides eaux d’un puits de silence profond Où meurt même le souvenir et où les rêves se défont…...
O dieu redoutable et concupiscent A tes pieds je viens en m’accroupissant Donne-moi la chair donne-moi la viande La graisse et les jus dont je suis friande Les membres à vif tout gorgés de sang Que je lècherai en les dépeçant Seigneur jette-moi cet homme...
Pas de coup de semonce, rien, mais il arrive que je sente, Impérieux, s’emparer de moi ce désir fou de mutisme – oh ! C’est une complainte indicible, antienne sans rimes, sans mots, Ni lamentation ni prière, et pourtant triste et caressante. Oui, ce chant...
Accourez vite à mon secours Vous les femmes que j’ai connues N’en aimer qu’une est un peu court Je veux vous revoir toutes nues Ah je me vautrais sur vos flancs Au temps de nos amours anciennes N’en aimer qu’une c’est gonflant Serait-ce la belle païenne...